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Dans cette rubrique des mères, pères, grands-parents, témoignent de leurs parcours dans cette aventure autour de bébé. Ces "Paroles de Parents" sont récoltées et coordonnées par Régine Prieur.
03 mars 2022
Violaine
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Adèle a une hypothyroïdie. Nous l’avons appris dix jours après sa naissance suite au test de Gutrie réalisé sur son talon à la maternité. Je me revois, le téléphone contre l’oreille, mon bébé dans mes bras en écoutant la pédiatre endocrinologue au téléphone. J’étais atterrée.

Même si j’ai pleuré ce jour-là, je crois que je n’ai réalisé que bien plus tard. Je sentais bien depuis la naissance de mon bébé que quelque chose clochait. Elle dormait beaucoup, pleurait peu, n’arrivait pas à téter sans qu’on puisse m’expliquer pourquoi. J’avais finalement mis ça sur le compte de sa jaunisse. Ces signes-là et d’autres comme sa naissance après le terme étaient liés à son problème de thyroïde.

À l’hôpital, même si nous avons été très bien pris en charge, il a été difficile pour moi de voir mon minuscule bébé dans la grosse machine lors de la scintigraphie. Puis il y a eu les doutes affreux : si vous ouvrez un dictionnaire, vous trouverez que l’hypothyroïdie peut engendrer un retard mental. J’ai même trouvé le mot « crétinisme ». Des mots qui me faisaient mal alors que je regardais ma petite fille. Cela ne changeait rien à l’amour inconditionnel que je lui porte mais je m’interrogeais : comment va-t-elle s’intégrer dans la société ? Est-ce qu’elle deviendra autonome ? Faudra-t-il chercher une école spécialisée ?

Je disais souvent à mon conjoint que notre vie avait basculé dans un cauchemar et j’ai beaucoup pleuré. J’aurais tout donné pour que ma thyroïde dysfonctionne plutôt que la sienne. Ne pas savoir pourquoi c’était arrivé m’obsédait aussi ; je cherchais à comprendre ce que j’avais fait de mal. Notre vie était rythmée par les hospitalisations de jour – toutes les trois semaines car il était compliqué d’ajuster le traitement.

On nous a conseillé de ne pas parler du problème de santé du bébé dans la mesure où il ne se verrait pas. Nous l’avons seulement dit à la famille proche. Parfois, cela me pèse de ne pas communiquer là-dessus mais au vu des réactions de certains membres de la famille, je crois que c’était préférable. Il y a ce qu’on trouve sur Internet, et puis j’ai l’impression que beaucoup de gens projettent des choses sur la thyroïde : parce qu’elle est liée aux émotions ? en raison des problèmes liés au Lévothyrox ? Je ne sais pas trop. J’ai moi aussi eu du mal à comprendre que je projetais des peurs sur mon bébé. D’ailleurs, les bébés ne prennent pas le fameux Lévothyrox mais des gouttes de lévothyroxine jusqu’aux 7 ans de l’enfants, à cause de la déglutition. Ces gouttes doivent être conservées au frigo et changées tous les mois. La France fait partie des rares pays qui proposent ce traitement. Il y a quelques mois, j’étais un peu peinée à la perspective de ne pas pouvoir voyager en avion à l’étranger pendant quelques années. Aujourd’hui, nous avons une glacière qui nous permettra de nous déplacer en voiture l’esprit tranquille.

J’ai proposé à mon mari d’économiser dans le projet de faire un beau voyage en famille pour les 7 ans de notre grande fille. Bref, aujourd’hui mon bébé va avoir 10 mois et je suis plus apaisée, moins inquiète. Elle m’a rassurée en se développant harmonieusement. Mon conjoint m’a aidée et nous sommes restés unis dans l’épreuve. Nous avons rencontré des professionnels de santé formidables (et d’autres ; mais ils nous ont fait avancer à leur façon). Nous avons mis beaucoup d’énergie les premiers mois pour que je puisse allaiter ma fille. J’en avais envie puis c’est devenu un combat, pour pouvoir lui donner mes hormones et l’aider à s’équilibrer même si ce sont là des petites quantités. Sa succion a progressé et elle a réussi à très bien téter. Cette victoire à trois nous a aidés sur bien des plans.

Quel bonheur de partager ces moments avec mon bébé ! Elle va très bien. Je finis par surmonter mes peurs pour le voir. C’est un très gentil bébé. Elle observe beaucoup le monde qui l’entoure de son regard profond, et elle aime aller vers les autres.

De mon côté j’essaye de me reprendre en main : j’ai pris plus de poids après ma grossesse que pendant (!) et mes cheveux ont blanchi d’un coup, suite au choc.

Bien sûr, le souvenir de cet appel téléphonique restera comme un moment très douloureux. Mais nous vivons des moments heureux. Le traitement se stabilise. Le problème de mon bébé est d’origine génétique : un cas très rare pour une maladie déjà rare. Moi qui voulais tant savoir, je me dis que ce n’est finalement pas le plus important.

Le hasard de la vie m’a permis de rencontrer une jeune femme ayant une hypothyroïdie détectée à la naissance, comme pour mon bébé. Cela m’a permis de me projeter avec une image très positive. J’ai simplement envie d’accompagner ma fille au mieux, avec son papa. Comme tous les parents.

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