03 mars 2022

Rebecca

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Elle me regarda avec ses grands yeux noirs comme si j’étais la chose la plus passionnante au monde, je voyais son visage pour la première fois et son regard me transperça. Ce jour-là, je fus maman pour la deuxième fois. Nina était née.

 Pour mon aînée, Luz, ce fut différent. Non pas moins merveilleux et magique, mais différent. Je ne me suis pas sentie maman tout de suite. J’avais traversé une grossesse un peu chargée en émotions et j’ai eu du mal à réaliser ce qui m’arrivait réellement le jour de sa naissance. Comme si, au début, le costume de maman était trop grand pour moi. Ou au contraire trop juste, j’avais du mal à me faufiler dedans, à l’enfiler.

Puis, elle aussi m’a fait craquer, la chair de ma chair, mon sang, ma fille. Mes filles. Mes deux petits trésors. Et l’arrivée de la seconde fut au début comme un ouragan. Moi pourtant persuadée que tout allait glisser… Encore une conviction qui s’écroule, comme beaucoup d’ailleurs qui s’étaient déjà effondrées depuis que j’étais devenue maman.

Luz, mon aînée, est une petite fille très facile. Une enfant très gentille, mignonne et sage. Elle a toujours bien mangé, bien dormi, écouté ses parents… Une vraie poupée. Je suis retombée enceinte assez rapidement après sa naissance, une autre petite fille : merveilleuse nouvelle ! Et elles allaient avoir deux ans d’écart. « Deux ans, c’est bien, pensais-je, elles vont rapidement bien s’entendre, jouer ensemble… » Ce que je n’avais pas prévu, c’est la réaction de Luz à la naissance de sa petite sœur. Tout ce qui était acquis, tout ce qui était facile, volait en éclats. Mais qui est donc cette petite fille ? Je ne la reconnaissais plus. Il y avait une grande colère en elle, elle nous en voulait. On lui avait vraiment fait un enfant dans le dos…

Elle s’est donc mise à changer de comportement brusquement à l’arrivée de sa sœur. Dormir ? Il n’en est pas question. Désormais, ce sont des heures de négociations pour aller se coucher le soir, des pleurs interminables… « Pourquoi devrais-je aller au lit alors que Nina reste avec Papa et Maman ? » Il y a eu les nuits blanches. Elle se réveillait à minuit et pouvait ne se rendormir qu’à 6 h du matin, épuisée, après avoir pleuré toute la nuit. Des pleurs inconsolables, comme s’il y avait en elle une immense tristesse.

Manger ? Non plus, ça ne l’intéresse plus : « J’en veux, j’en veux pas », elle fait ouvrir trois yaourts différents, elle ne veut plus manger toute seule…

Elle s’est mise à faire des crises, à se rouler par terre de colère, chose qu’elle n’avait jamais fait auparavant. Elle ne veut plus qu’on lui change la couche, ne veut plus s’habiller le matin…

Tout, tout, absolument tout était devenu compliqué et source de conflit. Et ce qui me perturbait le plus, c’est qu’elle essayait de nous taper, de nous griffer… Chose également qu’elle n’avait jamais fait jusqu’alors.

« Maman n’est plus trop disponible, Papa joue avec quelqu’un d’autre que moi… » Dur, dur, tout ce changement…

Mais qui est cet enfant ? ! Juste une petite fille qui vient d’avoir une petite sœur…

Au bout de quelques semaines, épuisée, j’ai décidé, sur le conseil d’une amie, de l’emmener faire une séance de microkinésithérapie. Cela l’avait beaucoup aidée pour ses filles. Après seulement une seule séance, nous avons commencé à voir des changements. Elle s’apaisait. Coïncidence ou pas, les choses rentrèrent dans l’ordre tout doucement.

Aujourd’hui, la première chose que fait Luz le matin, c’est d’aller dire bonjour à sœur : « Bonjour, bébé Na ! » C’est comme ça qu’elle l’appelle. Pour tout le reste, eh bien, les choses sont revenues quasiment à la normale. Manger, dormir, écouter… L’ouragan « Nina » aura duré 1 mois et demi. Puis, la tempête passée, chacun a trouvé sa place dans notre belle petite famille.