Article

26 avr. 2022
Hélot Christine
Temps de lecture :

Dans un article publié par la revue Le Furet, j’écrivais que toutes les structures de la petite enfance sont multilingues. J’expliquais ce constat par le fait qu’elles sont aujourd’hui fréquentées par un nombre croissant d’enfants et de familles qui sont en contact avec deux ou plusieurs langues autres que le français et que, même si seule une langue est utilisée par le personnel éducatif, ces enfants sont de fait plurilingues. Ils sont pluri-lingues parce qu’ils découvrent le monde qui les entoure dans une, voire plusieurs langues à la maison et dans une autre langue à la crèche. De plus, très souvent, le personnel des crèches est lui-même plurilingue, même si les compétences en la matière ne sont pas mises en avant ou sollicitées.

Aussi est-il grand temps de ne plus considérer ces phénomènes de multilinguisme et de pluralité culturelle comme une anomalie mais plutôt comme la norme, tout comme le sont les mouvements de migration. En réalité, nos sociétés n’ont jamais été culturellement et linguistiquement homogènes, elles n’ont jamais été monolingues, et les populations se sont toujours déplacées au cours des siècles. Ce sont ces déplacements de personnes qui parlent des langues et ou des variétés de langues différentes qui créent les phénomènes de multilinguisme et d’hétérogénéité culturelle. Ce qui différencie surtout le XXIe siècle, c’est l’accroissement des échanges commerciaux dû à la mondialisation et le développement des technologies numériques qui rapprochent les populations dispersées autour du globe par le biais des réseaux sociaux et des communications par Internet. Sans oublier, depuis les années 1980, l’avènement d’une économie néolibérale qui creuse les inégalités sociales de façon vertigineuse. Dans ce contexte économique et politique déstabilisant, les langues et les cultures ne sont pas exemptes de luttes de pouvoir, de phénomènes de domination et de minorisation, et de ce que des chercheurs ont qualifié de « glottophobie » (Blanchet, 2016), ou racisme linguistique (Weber, 2014), qui jouent un rôle dans la reproduction des inégalités (Hélot et Erfurt, 2016) et peuvent être la source de différentes formes de discriminations.

Il n’est donc pas surprenant que de plus en plus de structures pour la petite enfance s’interrogent sur la visibilité accrue du multilinguisme sociétal et sur la façon d’accueillir les enfants plurilingues et leurs familles, surtout lorsque ces dernières ne parlent pas français. La question est complexe dans le sens où les institutions françaises, en particulier l’école, fonctionnent sur la base d’un monolinguisme essentialisé et supposé garantir la cohésion sociale. Il s’agit donc de repenser nos modes de fonctionnement langagier (ou nos politiques linguistiques éducatives), et surtout nos représentations des langues et du bi/multilinguisme sur les plans sociétal et individuel, pour garantir à tous les enfants un accueil de qualité. Il est aussi nécessaire de rappeler que toute famille a le droit de transmettre sa/ses langues et cultures à ses enfants. Mais la complexité des situations de multilinguisme n’est pas sans poser problème aux professionnels de la petite enfance, qui doivent s’adapter aux phénomènes de migration et de diversité linguistique et culturelle, tout en veillant au développement langagier du jeune enfant, et ce sans nécessairement connaître les langues et les cultures qu’ils rencontrent.

Accueillir la diversité linguistique et culturelle en crèche : une question de justice sociale

En France, de nombreux enfants sont socialisés en crèche dès la fin du congé de maternité, soit à l’âge d’environ 3 mois pour le premier enfant. Ce dispositif a un impact spécifique sur le développement langagier d’un enfant qui grandit en contexte bi ou multilingue. En effet, pour un enfant monolingue en contact avec la même langue à la maison et à la crèche, une continuité linguistique existe et dans l’ensemble une continuité culturelle également, soit le même type de relations à la façon dont on s’occupe d’un bébé. Pour un enfant qui vit chez lui une autre culture, et surtout à qui on parle une ou plusieurs langues autres, il y aura discontinuité linguistique lors de la fréquentation de la crèche, et parfois même un écart culturel qu’il conviendra de négocier avec les familles.

Cette distinction entre enfant monolingue francophone et enfant bi/plurilingue (en devenir francophone) est importante, car si l’enfant plurilingue fréquente la crèche de longues heures, il pourra être davantage en contact avec le français qu’avec sa langue familiale, entraînant souvent chez les parents une certaine peur que l’écart culturel ne se creuse et que la langue familiale ne disparaisse du répertoire linguistique de leurs enfants. Certes, d’autres parents seront rassurés que leurs enfants acquièrent le français à la crèche et soient ainsi mieux préparés à l’entrée en école maternelle. Rappelons que, dans les deux cas, il s’agit d’enfants bilingues ou plurilingues puisqu’ils grandissent avec deux ou plusieurs langues, et qu’il est important d’utiliser cet adjectif bilingue pour qualifier ces enfants, même avant qu’ils prononcent leur premier mot (Hélot et Rubio, 2013). On sait combien les dénominations positives ont un impact sur les représentations ; d’ailleurs en France, la plupart des parents ne rêvent-ils pas que leurs enfants deviennent bilingues [2] ? Qualifier ces enfants de bilingues permettra également de se souvenir qu’ils sont en contact avec une autre langue en dehors de la crèche, et qu’il est important de donner si possible une place au sein de la structure à cette langue et à la culture familiale de l’enfant pour soutenir son bilinguisme.

Cela dit, l’objectif d’une structure de la petite enfance est d’assurer le bien-être et la sécurité du jeune enfant ; il est indéniable qu’un développement langagier de qualité participe de façon cruciale à ce bien-être. Si une attention particulière doit être portée au développement langagier de tous les enfants, le processus est plus simple pour les enfants francophones, puisqu’il y a continuité avec les pratiques familiales. Cela signifie que les enfants en situation de multilinguisme (et leurs familles) ont des besoins spécifiques auxquels il convient de répondre avec sensibilité et en connaissance de cause. J’aime répéter qu’il s’agit avant tout de valeurs, de justice sociale, d’accueil de la diversité et d’hospitalité (Hélot, 2007). Ces enfants plurilingues n’ont pas choisi de parler une langue autre que le français, et nombre de familles migrantes n’ont pas eu d’autre choix que de quitter leur pays. Ces familles et ces enfants qui viennent d’ailleurs apportent avec eux des pratiques linguistiques et culturelles autres, qui certes nous questionnent, mais qui nous permettent aussi de relativiser les nôtres. La crèche peut être le premier lieu de socialisation dans une institution française qui se doit d’accueillir les différentes langues et cultures, non en termes de problème mais davantage comme une ressource nouvelle, permettant aux enfants, aux parents et aux professionnels de mieux comprendre le monde qui nous entoure et, surtout, de garantir à tous les enfants, quel que soit leur héritage, la possibilité de se développer le plus harmonieusement possible.

Quelques éléments sur le développement langagier bilingue

La question première qui se pose du point de vue de l’acquisition langagière du bébé ou du jeune enfant est donc de savoir s’il y a, ou non, une continuité linguistique de la maison à la crèche, parce que des langues différentes sont parlées dans chaque contexte. Ces dernières décennies, tous les travaux sur le développement langagier bilingue ont montré que le bilinguisme ne cause pas de retard langagier, que les différents stades d’acquisition langagière sont les mêmes que pour l’enfant monolingue, sinon que l’enfant bilingue acquiert deux codes linguistiques et, très jeune, la capacité de passer de l’un à l’autre selon les interlocuteurs ou la situation de communication. Ainsi, une enfant dont les parents parlent tchétchène à la maison et qui fréquente une crèche francophone développera une compétence langagière bilingue dans ces deux langues. Par contre, ce type de contexte bilingue n’est pas tout à fait le même que celui d’un enfant qui grandit avec deux langues à la maison et dont chaque parent parle une langue différente dès la naissance. Cette forme de bilinguisme est qualifiée de « simultanée », l’enfant développe ses capacités langagières au travers de deux langues. Les chercheurs distinguent donc le bilinguisme simultané du bilinguisme consécutif ou séquentiel, où l’enfant est en contact avec une deuxième langue plus tard ; en d’autres termes il y a eu un processus de développement langagier préalable dans une langue avant l’autre (Mc Laughlin, 1984). Mc Laughlin avait situé de façon un peu aléatoire la limite d’âge entre bilinguisme simultané et consécutif vers 3 ans. Des travaux plus récents de De Houwer (2009), par exemple, distinguent de manière plus fine entre une acquisition bilingue première dans le cas d’une exposition aux deux langues dès la naissance, et une acquisition bilingue seconde dans le cas d’une exposition à la deuxième langue qui commencerait entre un mois à six mois plus tard. Il s’agit donc bien de distinguer entre acquisition bilingue première du langage et acquisition monolingue première du langage.

Que cela implique-t-il pour une crèche qui reçoit de jeunes enfants ne parlant pas français en contexte familial ? Si peu de recherches ont été menées sur de très jeunes enfants dans cette situation en crèche, une recherche sur des enfants de 3 ans en Angleterre (Thompson, 2000) a montré que très vite, après quelques mois, les enfants préféraient s’exprimer en anglais plutôt qu’en punjabi, la langue de leurs parents. Cela veut dire que les enfants comprennent très vite que certaines langues (et donc cultures) ont plus de valeur que d’autres, ce qui peut provoquer des sentiments d’infériorité par rapport aux pratiques de leurs familles, et entraîner une perte de la langue familiale et un retour au monolinguisme. De plus, le danger principal pour les enfants bi/plurilingues est que leur non-compétence en français les rende silencieux. On sait que pour apprendre à parler il faut parler, et que pour que les enfants acquièrent la capacité de langage ils doivent recevoir un input langagier riche et intense. La difficulté avec de très jeunes enfants en contexte bi/multilingue est donc de s’assurer qu’ils bénéficient d’une exposition suffisante aux deux langues ; or, cela est loin d’être toujours possible en crèche, où le personnel même plurilingue ne parle pas nécessairement les langues des enfants. Sans nier cette difficulté, cela n’empêche pas les structures de la petite enfance de s’interroger sur les formes de continuité linguistique et culturelle qu’elles pourraient instaurer entre la maison et la crèche, avec la coopération des parents.

Ouvrir sa crèche au multilinguisme et à la diversité des cultures

Cette mise en œuvre requiert toute une réflexion de la structure sur les langues et les cultures des familles, et sur la façon de les accueillir au sein des activités journalières. Il est d’ailleurs fréquent aujourd’hui que les structures procèdent à un recensement des langues parlées dans les familles, mais plus rare de recenser les langues du personnel et de les afficher. Ce recensement gagnera à inclure toutes les compétences du personnel et à remettre en question la notion de locuteur natif et de langue maternelle. Les travaux récents en linguistique appliquée ont montré que les individus plurilingues possèdent un répertoire se définissant comme un ensemble de ressources linguistiques plurielles qui change au fil du temps, et dans lequel ils puisent selon leurs besoins de communication. Les chercheurs expliquent que ce répertoire est dynamique, dans le sens où il se reconfigure selon les expériences vécues. Ils ont en outre montré que les compétences dans les diverses langues ne sont jamais égales, puisque le bilinguisme parfait n’existe pas, pas plus, d’ailleurs, que le monolinguisme parfait.

Cette vision différente des compétences linguistiques du personnel travaillant en crèche permettra de démythifier le bi/plurilinguisme, et surtout, de considérer toute compétence en langues autres que le français et toute connaissance culturelle comme des ressources que l’on pourra mobiliser au sein de la structure selon les besoins des enfants. Ensuite, il sera important de transmettre un message fort aux parents : leur dire que leurs langues et leurs cultures sont accueillies et non rejetées au profit du français, et leur expliquer pourquoi. En d’autres termes, leur expliquer que leurs enfants sont en situation de bilinguisme et que ce bilinguisme représente une richesse, à la fois pour leur enfant et pour la structure, même s’il n’est pas aisé de le soutenir de façon concrète dans certaines langues inconnues des professionnels.

Dès lors, comment assurer concrètement cette continuité linguistique pour les enfants plurilingues [3] ? Souvent, le premier élément d’altérité culturelle est le prénom de l’enfant, qu’il importe de prononcer correctement ; ensuite, l’apprentissage de quelques formules de réconfort peut lui procurer un sentiment de sécurité accru. Certes, il n’est pas si simple pour les professionnels d’entrer ainsi en contact avec une ou plusieurs langues inconnues et de s’en approprier quelques éléments de base, mais c’est aussi l’opportunité d’organiser avec les parents quelques séances de formation à leurs langues et cultures. Une telle démarche mettra les parents en position d’experts, de collaborateurs, et permettra au personnel d’adopter une position similaire à leur égard dans l’apprentissage du français. Quelques éléments linguistiques et culturels pourront ainsi être transmis et constituer un premier ensemble de ressources, pour une meilleure communication avec les enfants.

Ce genre de rencontres a aussi l’avantage de mettre en place un premier dialogue avec les familles qui peut ensuite permettre aux professionnels d’expliciter les règles de fonctionnement de la structure, et surtout, la nature des activités proposées aux jeunes enfants. Les parents qui n’ont pas connu ce genre de structures dans leur pays d’origine peuvent penser, par exemple, qu’il s’agit tout simplement de « garder » les enfants. La présence d’interprètes peut également être nécessaire, d’où l’importance aussi de se constituer un réseau de personnes plurilingues qui aideront à construire des relations de confiance dès l’arrivée en crèche. De plus, accueillir les parents en leur donnant un rôle de « négociateur » au sein d’une structure peut constituer une première étape dans l’intégration des personnes immigrées, la langue française devenant la langue de l’hôte qui reçoit les autres langues/cultures afin de construire un sentiment d’appartenance à la structure, au-delà des différences et d’une injonction à apprendre la langue du pays d’accueil. Rappelons que la plupart des migrants veulent apprendre la langue du pays qui les « accueille », mais que l’apprentissage d’une langue demande du temps ainsi que de l’énergie et de la motivation, qui ne sauraient être nourries par le sentiment de rejet.

Enfin, dans ce projet de développement de ressources linguistiques et culturelles plurielles, on ne peut oublier le livre, l’album de jeunesse, avec ou sans texte, qui permet d’entrer dans la culture française mais qui transmet aussi des valeurs universelles et peut être lu dans différentes langues. Un nombre croissant de maisons d’éditions [4] proposent des ouvrages en diverses langues, des ouvrages bilingues ou multilingues, sans oublier les contes traduits qui nous transportent dans des univers culturels différents. Le projet Babil Babel [5] (Rateau et Baudet, 2017), de l’Agence quand les livres relient, propose sur trois ans des conférences et moments d’échanges et de réflexion sur le langage, les langues et le plurilinguisme, la ou les langues des albums de jeunesse, ainsi que sur le rôle des bibliothèques dans la valorisation des langues et des cultures autres.

La langue, construction du monde, les langues, construction de l’altérité

« Portant la trace de l’organisation du monde que notre culture a élaborée, la langue nous situe certes dans l’univers. Mais elle fait plus que cela : c’est elle qui construit cet univers et cette culture. Elle ne s’approprie pas le sens : elle le fabrique »
(Klinkenberg, 2015, p. 23).

 

Les linguistes ont depuis longtemps étudié la relation entre langues et cultures, et donnent des exemples tels que les noms de couleurs qui diffèrent d’une langue à l’autre : par exemple, en gaélique il existe deux mots pour exprimer la couleur verte, selon qu’elle décrit un objet animé ou inanimé. En japonais, le terme omaiyari désigne la capacité de comprendre les pensées d’un autre sans qu’elles soient exprimées verbalement, soit la compréhension par empathie, qui est une qualité humaine très appréciée au Japon. Les termes de parenté varient aussi d’une langue à l’autre : la belle-mère française a deux correspondances en anglais, mother in law et step mother ; frère et sœur ne sont qu’un seul terme en malais, mais quatre termes en hongrois, pas un mais deux mots pour sœur en japonais, un pour sœur aînée et un pour sœur cadette ; en finnois, la distinction entre il et elle n’existe pas et se traduit pas un seul pronom. Et imaginez le désarroi d’une mère française vivant en Espagne et voulant cacher des œufs de Pâques dans son jardin pour ses enfants : pas d’œufs en chocolat en Espagne mais des processions religieuses ressemblant à celles du Ku Klux Klan aux États-Unis ! Et que penser du regard que portent les Japonais sur le jeune enfant qui n’est dans cette culture que bonté naturelle, et à qui l’on permet toutes sortes de conduites qui ne seraient pas tolérées en Europe [6] ?

Ce sont donc des cultures différentes qui codifient dans la langue une autre représentation du monde. Ainsi, toutes nos expériences et toutes nos connaissances sont catégorisées par le langage, et catégorisées différemment d’une culture à l’autre, et nous interprétons ce que nous vivons au travers de ces catégories. Ainsi, comme l’exprime si clairement Klinkenberg (2015, p. 24) : « Si le monde à des problèmes, c’est aussi le langage qui les institue en problèmes. » On comprendra mieux à partir de cette citation pourquoi j’ai insisté plus haut sur la dénomination bi/plurilingue qu’il s’agit d’attribuer aux enfants qui parlent deux ou plusieurs langues, et sur le choix de concevoir et d’exprimer la diversité culturelle en termes de ressources plutôt que de problèmes. Car la langue est aussi un objet politique qui permet d’influer sur notre interprétation de la réalité et de refuser des termes qui définissent négativement les individus ou qui les enferment dangereusement dans des catégories dont il est ensuite très difficile de se débarrasser. Ainsi, plutôt que parler d’enfants ou de familles « allophones », pour exprimer le fait qu’ils parlent d’autres langues que le français, pourquoi ne pas leur offrir le qualificatif « bilingue » qui, en France, transformera le regard porté sur eux ?

La langue sert donc à construire notre monde et notre société ; elle sert également à nous y situer et à nous y orienter. Les différences entre les langues renvoient à des organisations du monde qui ne sont pas toujours compatibles entre elles, et qui peuvent créer de l’incompréhension. Mais comme le dit si bien Alain Touraine (1997, p. 313), « le sens construit par chaque culture est différent mais il ne peut y avoir de communication entre les cultures que si chacune reconnaît dans les autres la construction d’une partie du sens de l’expérience humaine ».

Entrer en contact avec la langue de l’autre, et donc avec sa culture, c’est d’une certaine façon entrer dans un monde nouveau, traverser les frontières de notre propre univers culturel, et entrer dans un univers où la différence, certes, nous surprend, mais nous ouvre à d’autres possibles, nous oblige à abandonner nos repères pour imaginer le monde au travers du regard de l’autre, comme l’exprime cette magnifique photo de S. Krieg, celle d’une femme de Salvador de Bahia (Brésil), photo installée sur les rives du Rhin, à Kehl en Allemagne et dont la légende dit : Die Welt mit anderen Augen sehen, die Welt mit den Augen des Anderen sehe.

 S’ouvrir aux autres cultures demande de la curiosité, une ouverture, une capacité à se décentrer, un désir de dialogue ; la rencontre avec des cultures inconnues donne un sens du relatif qui peut permettre un apprentissage de la tolérance.

Ainsi, commencer dès la crèche à découvrir ensemble, enfants, familles et professionnels, cet apprentissage de l’altérité linguistique, culturelle, ethnique religieuse et autre, peut constituer un projet de vivre ensemble. Sans oublier, que justement, un des avantages du bilinguisme est que, en ayant accès à deux langues, le bilingue a aussi accès à deux cultures et que, très jeune, il saura négocier les différences entre elles.

Conclusion

Accueillir en crèche des familles et des enfants qui ont un autre vécu culturel est avant tout une façon de vivre non pas la différence, comme l’explique clairement Doridant (2006, p. 241), mais l’altérité. Alors que la différence renvoie à une commune mesure, à une norme partagée par rapport à laquelle les individus diffèrent, et « qu’elle suppose la mesure et le classement, l’altérité, elle s’y rebelle. Elle est toujours création d’un rapport à soi – tant il est vrai que “Je est un autre”, comme l’écrivait Rimbaud – et d’un rapport à autrui ».

Si de nombreuses professionnelles des structures de la petite enfance vivent déjà la multiplicité des langues et des cultures à la fois comme un questionnement personnel et comme une formidable ressource pour tous les enfants, c’est parce qu’elles ont compris qu’il faut mettre les différences au service de l’altérité, et que dès le plus jeune âge, il faut faire une place à la singularité de chaque enfant, pour ensuite faire advenir leur altérité en tant que sujet. Dès lors, on aura compris qu’il ne s’agit pas simplement de célébrer la diversité des langues et des cultures dans une crèche, mais plutôt d’aller à la rencontre d’autrui – et de soi-même – c’est-à-dire d’accueillir l’altérité, de susciter des rencontres, d’inviter les familles au dialogue, pour transformer son regard sur l’autre et sur soi-même.

Commentaires

Ajouter un commentaire

Vous devez vous connecter pour poster un message !

Contact

33 avenue Marcel Dassault
31100 Toulouse

05.61.95.67.35

hello@spirale.com

Newsletter personnalisée

Inscrivez-vous à notre newsletter personnalisée et recevez des informations et conseils sur les thèmes que vous souhaitez !

S’inscrire à la newsletter

© 2024 Spirale - éditions érès | Mentions Légales | Plan du site